“Ode To Sleep”
Haruka & Yume
C’est dur, la nuit, quand on arrive pas à dormir. Quand notre cerveau est tellement tourmenté par des problèmes extérieurs qu’il refuse catégoriquement de se reposer. Haruka se tournait et se retournait dans son lit, blâmant un coup les couvertures, un coup l’oreiller. Dans la journée, il avait rencontré sur internet une énigme mathématique qui semblait fort compliquée mais, connaissant ses capacités avec les chiffres, il avait été persuadé qu’il serait capable de la résoudre. Seulement, il n’y était pas arrivé, même après avoir planché la journée dessus. Rien. Nada. Pas la moindre idée du résultat de cette énigme. Première fois que cela lui arrivait, et c’était tellement frustrant que ça l’en empêchait de dormir.
Il se leva finalement, s’habilla avec les premières choses qui lui passaient sous la main et s’assit à son bureau, se munissant d’un crayon et d’une feuille. Il griffonna rapidement l’énigme qui le hantait, essayant vainement de la résoudre et remplissant rapidement le papier de ratures. Il grogna, froissant le papier dans ses mains et le jetant à travers la pièce. Mais aussitôt, il reprit une feuille, coucha une nouvelle fois l’énigme sur le papier, puis plia ce dernier pour le fourrer dans une de ses poches, faisant tourner le crayon entre ses doigts.
Dans la chambre, on étouffe. Pas étonnant que le cerveau d’Haruka soit incapable de résoudre cette énigme. C’est pour cela qu’il prit la décision de sortir un peu. D’aller sur le toit. Est-ce qu’il en avait le droit ? Cela ne l’importait pas. Avant de sortir, il attrapa un parapluie gris qu’il épousseta avec un petit sourire. C’était un de ses parapluies préférés, malgré la simplicité de la couleur et de la toile, il lui avait toujours été fidèle.
Il sort finalement de la chambre, prenant garde à faire le moins de bruit possible. Noir. Il fait noir dans le couloir et, jusqu’à preuve du contraire, Haruka est incapable de voir dans le noir. Tant pis. Il pointe son parapluie en avant, histoire de s’en servir de la même façon qu’un aveugle se sert d’une canne. Heureusement encore que quelques rayons de lumière étaient là pour troubler l’obscurité, sinon le passage des escaliers aurait été une véritable épreuve.
Enfin, il déboucha sur le toit. L’air frais qui s’engouffra immédiatement dans ses poumons le fit frémir, et il se frotta les bras. Il ne faisait pas très chaud sur le toit, bien moins chaud qu’à l’intérieur, et il n’était pas beaucoup habillé, mais il n’avait pas la foi de redescendre pour mieux s’habiller.
Il s’avança, cherchant la place adéquate, et s’assit par terre en posant son parapluie sur ses genoux. Il récupéra la feuille et le crayon du fond de sa poche et déplia le papier, se mettant à le tourner dans tous les sens, ayant sûrement l’espoir que la réponse se cache dans une quelconque illusion d’optique créée par le tortionnaire qui a imaginé cette énigme. Mais toujours rien, le mystère restait entier.
Agacé, il soupira en posant le papier à côté de lui, bloqué sous le crayon. Avec précaution, il enleva le parapluie de ses genoux en se levant. Il ouvrit le parapluie, le pointant vers la lune, fasciné par l’effet que donnait la lumière nocturne à travers la toile fine et grisâtre du parapluie. Après quelques minutes de contemplation, il referma le parapluie, et s’approcha du bord, appuyant ses coudes sur le rebord. Ce dernier était haut, assez pour que personne n’ait trop de risque de tomber, et trop haut au goût d’Haruka. Comment pouvait-il profiter du panorama avec un rebord pareil ?
Sans attendre, il se hissa sur le rebord, regardant vers le bas sans penser une seconde aux conséquences qu’aurait une chute de cette hauteur. Il étira ses bras en baillant, tenant parfaitement en équilibre sur le rebord. Il se retourna, lâchant le parapluie par terre, puis se remit face au vide, fourrant ses mains dans ses poches et levant les yeux vers le ciel. Mais, alors qu’il était persuadé d’être seul, il cru entendre la porte du toit s’ouvrir. Imagination ? Possible. Sans lâcher le ciel des yeux, il tendait l’oreille, écoutant ce qu’il croyait être des pas. Un sourire presque sinistre éclaira son visage. Un visiteur ? Intéressant.